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Tuesday, July 24, 2007

* L'extrême nord de toutes les aventures *


** Le pôle nord fascine les explorateurs et les scientifiques depuis toujours. Et le réchauffement climatique leur donne une bonne raison de s'y rendre.

Cap au nord où le cercle arctique a tendance à accueillir les projets scientifiques les plus loufoques.

Prenez par exemple l'Ottawa Citizen, un quotidien canadien tout ce qu'il y a de plus sérieux. Le 20 juillet dernier, il expliquait à ses lecteurs comment une étudiante de l'université du New Brunswick, Melissa Battler, avait accepté comme job d'été de s'isoler 4 mois durant dans l'île de Devon, située au-delà du cercle polaire. 6 autres personnes l'ont rejointe et tout ce petit monde habite "une sorte de boite de thon haute de deux étages" dans le seul but de reproduire la vie sur Mars.

Pourquoi cette île perdue du nord Est canadien : à cause des conditions extrêmes, bien sûr, mais aussi à cause d'un cratère, le cratère de Haughton, qui s'est formé sur cette île il y a 23 millions d'années et qui ressemble à s'y méprendre aux cratères martiens.

Pour vivre à l'heure martienne, notre étudiante à dû apprendre à retarder quotidiennement sa montre de 39 minutes, parce que sur Mars, le jour est donc plus long de 39 minutes. Mais le plus difficile, pour Melissa, est que, pour sortir à l'extérieur, il faut impérativement revêtir un scaphandre d'astronaute. Ca fait partie du contrat. Sans compter la nourriture lyophilisée et l'unique douche hebdomadaire. Le tout pour des missions sur Mars qui ne pourront – au mieux – être organisée qu'à partir de 2030 !

Le Bangkok Post s'est passionné pour les travaux d'un scientifique danois au large des îles Féroé, Bogi Hansen. Les îles Féroé sont un archipel danois à mi-chemin entre l'Islande et la Norvège. M. Hansen passe son temps de scientifique à sonder le Gulf Stream dans l'Atlantique Nord avec son sonar. Le Gulf Stream, vous le savez, c'est ce courant marin d'origine tropical qui passe notamment au large des côtes françaises et dont on dit qu'il rend nos hivers plus doux. Or une des théories les plus catastrophistes de ces dernières années à propos du réchauffement climatique, c'est qu'en fondant, la calotte glaciaire de l'arctique affaiblirait d'autant le Gulf Stream. Ce qui finirait par provoquer une sorte de nouvelle ère glaciaire en Europe occidentale.

Et bien en fait, le professeur Hansen et, avec lui, un centre de recherche sur le climat de Bergen, en Norvège, pensent exactement l'inverse. En clair, non seulement le Gulf Stream n'est pas prêt de s'affaiblir au point de s'arrêter, mais en s'affaiblissant légèrement, il pourrait permettre à l'Europe de ne se réchauffer "que" de deux ou trois degrés dans le siècle à venir, contre 3 à 4° pour le reste de la planète.

C'est d'autant plus vrai, ajoute cette fois – et toujours dans le Bangkok Post – un autre scientifique de l'université de Columbia, Richard Seager, que cette histoire de Gulf Stream qui rendrait les hivers européens plus doux serait un mythe. En fait, explique le docteur Seager, "le Gulf Stream n'est capable à lui tout seul que d'ajouter deux ou trois degrés sur terre". C'est très peu lorsqu'à la même latitude, on constate des différences de 15 à 20° en hiver entre l'Europe et l'Amérique.

Et puis, histoire de continuer à briser des tabous, je voulais vous parler des effets positifs du changement climatique en cours. Prenez le Groenland par exemple. Le Washington Post y consacrait une page entière ce week-end. Le Groenland, c'est la plus grande île du monde – c'est 4 fois grand comme la France – et c'est là que le réchauffement climatique est le plus visible. Le territoire est recouvert à plus de 80% par la glace et la banquise s'amenuise un peu plus tous les ans, délivrant toujours plus d'icebergs dans l'Atlantique Nord.

Mais le Washington Post a trouvé au moins deux heureux : le maire d'Ilulisat d'abord : une petite ville de 4 600 habitants à l'ouest du Groenland. Le maire en question, M. Frederiksen et sa ville ont la chance d'être installé au bord d'un glacier géant qui produit, bon an mal an, 20 milliards de tonnes d'iceberg (c'est-à-dire la quantité d'eau douce consommée par le France en une année). Et bien depuis que l'on parle de réchauffement climatique, son village est devenu LE must du tourisme écolo ! Sur place, l'office du tourisme a organisé des "réchauffement climatique tour" pour presque rien. Et ça marche !

Et puis il y a les paysans. Parce que sur les 56 000 Groenlandais, il y a aussi des paysans et des éleveurs. Et ces derniers ont remarqué que l'été durait plus longtemps, que l'herbe était plus riche et donc les moutons beaucoup plus gras. Sans compter qu'avec des hivers plus doux, on commence à réaliser sur place des expériences inédites, comme faire pousser des patates et autres légumes de toutes sortes.

Pour l'instant ce ne sont que des expériences, mais les paysans rêvent déjà que leur immense île glacée redevienne cette "Terre verte", ce "Green Land" qu'Eric le rouge avait colonisé au tournant de l'an mille avec quelques centaines de ses compagnons. Une aventure qui s'est achevée 4 siècles plus tard... Et vous savez pourquoi ? A cause d'un autre changement climatique justement : une mini-ère glaciaire cette fois.


Anthony Bellanger
Courrier International

*Photo :Melissa Battler
DR

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